Entrez dans la reine

L’histoire du jeu de baston est constellée de cycles de reconnaissance de la part des joueurs. A la mode tout un temps, les jeux permettant d’affronter un adversaire dans un ring ont été vite supplantés dans les salles obscures par les trois petits cochons concurrents nommés « plateformes », « shoot’em ups » ou encore « beat’em all ». Le grand méchant loup « jeu de bagarre » s’est petit à petit éloigné des feux des projecteurs, la faute à un style devenant parfois trop compliqué pour certains  joueurs, un peu désuet pour d’autres, et visuellement peu impressionnant face aux productions 3D débordantes de polygones que certains jeux d’arcade affichaient.

Le retour du Messie s’est effectué il y a peu grâce à Capcom, déjà maître dans le domaine du pandalagueule face à son adversaire de toujours, SNK. Sa saga Street Fighter ayant toujours tenu une place à part dans le cœur des joueurs, le 4^ème opus a fait ressortir les sticks d’arcade dans de nombreux foyers, et les vieux réflexes qu’etaient les quarts de cercles et autres combos sont vites remontés à la surface.

Mais l’ogre d’Osaka a un tel appétit que les plus petits ont du mal à toucher le gâteau dodu que représente la masse de clients  éventuels, et on a pu voir quelques jeux au potentiel excellent se faire descendre dans les charts à cause de l’occupation de terrain permanente de Capcom. Parlons même uniquement de Street Fighter IV, les autres productions maison ayant du mal à le concurrencer sur son propre terrain. Marvel vs Capcom 3 a fait un score honorable, Street Fighter X Tekken s’est vautré dans la fange, et les jeux du trottoir d’en face sortent leur plus beau maquillage pour attirer le chaland un peu perdu ou en quête d’excitations nouvelles.

Malgré tout, il reste quelque part quelques camps de Gaulois qui résistent aux hadokens, et Arc System Works n’est pas le moindre d’entre eux. Auteur d’une infinité de Guilty Gear, des excellentissimes Blaze Blue et enfin du très charismatique Hokuto no Ken sur Atomiswave (dont vous pouvez trouver la vidéo sur notre site, avec Shortcut aux manettes), on peut dire que la boîte sait ce que représente un jeu de baston. Et avec un univers aussi riche que celui de Persona, le spin-off de Shin Megami Tensei, on peut dire qu’on tient le combo gagnant !

Persona Très Grata

Ca fait plus d’un an que j’attends ce jeu, qui était déjà sorti aux States et au Japon, mais qui s’entêtait à bouder le Vieux Continent pour une raison qui nous échappait jusqu’ici. Maintenant que le Précieux est enfin arrivé jusqu’à ma console, l’excitation commence à monter. J’ai mis de nouvelles piles dans le stick, on commence le premier match et… qu’est-ce que c’est que ce bordel ? J’ai du mal à comprendre la moindre action, l’écran est constellé de jauges faisant passer Steel Battalion pour un jeu de Tamagochis, et j’enchaîne les combos sans rien comprendre, en appuyant toujours sur le même bouton.

Une cuisante défaite plus tard, je me décide humblement à passer par le mode tutoriel. Pardon ? 46 pages d’apprentissage ? Ne vous découragez pas, les premiers tests vous feront simplement vous accroupir, et les plus difficiles d’entre eux ne vous imposeront pas plus d’un cancel de combo pour faire un chain simple derrière, même moi j’y suis arrivé, c’est pour dire. Les jauges seront expliquées en détail, ainsi que les subtilités de chaque touche. Le jeu se joue à 4 boutons, et quasiment toutes les combinaisons sont exploitées. Au début un peu rude à apprendre, on se rend vite compte qu’il existe un tronc commun à tous les personnages, comme le Burst qui permet de faire une explosion permettant de vous évader, ou l’air dash qui donne de la mobilité aérienne. Une fois cette base apprise, il ne reste « plus qu’à » vous familiariser avec les différents personnages, tous très stylisés et fort différents.

Allez, on ne se décourage pas et on remet le couvert. Un peu laborieux au début, on se sent vite plus en confiance une fois qu’on saisit l’action, et le plaisir vient bien plus vite que prévu. Passons la logorrhée interminable qui coupe chaque match, surtout en mode histoire, pour nous concentrer sur les duels. Clairement orientés sur l’action, ils nécessitent de bien faire équipe avec son Persona, avatar propre à chaque personnage. Ces derniers amènent à la fois un énorme atout sur le terrain et quelques combos bien vicieux, mais ne sont pas invincibles, loin s’en faut. Il vous faudra donc combattre avec parcimonie aux côtés de votre allié, en évitant de l’exposer inutilement. Enchaînez avec quelques quarts de cercle, saupoudrez d’altérations d’état comme dans un jeu de rôles (dont une bien vicieuse qui inverse vos commandes) et savourez !

Technique au sol

D’un point de vue réactivité des commandes, on nage dans le pur bonheur. On appuie, ça tape. On saute, ça saute. Ça paraît stupide dit comme ça, mais ne pas se battre contre une latence de votre personnage est déjà un plus agréable. Mais le point fort du jeu, c’est son graphisme, assurément magnifique. La rétine du connaisseur est flattée, le jeu en 2D aura rarement été aussi beau sur console current-gen, et j’ai enfin compris pourquoi tous ces sticks customisés aux couleurs de Persona 4 étaient aussi réussis. Les mouvements sont fluides, et les spectateurs pourront s’attarder sur les détails qui parsèment le fond de l’écran, alors que le combattant appréciera le nombre de frames qui constituent chaque animation.Les styles de jeux sont très nombreux, et on pourra passer par un mode scénario, un mode arcade, des entraînements, des galeries d’éléments débloqués, etc… bref il y en aura pour tous les goûts. Malheureusement, le jeu, aussi distrayant soit-il, arrive tard, comme je vous l’ai déjà dit, et on peut légitimement se demander à qui il s’adresse. Programmé dans certains tournois estivaux de Versus Fighting (amis de BasGrosPoing.fr pardonnez-moi cette insulte à votre noble art), le jeu a malgré tout le cul entre deux chaises : il a perdu de son intérêt en Asie et aux States, où il est sorti il y a plus d’un an, et sa renommée en Europe ne lui permet pas de s’imposer ailleurs que dans un milieu d’initiés. Faut-il malgré tout craquer pour ce Persona ? Sans aucun doute. Sa qualité de gameplay vous apportera du plaisir, le jeu est super réactif, et promet des parties solo très sympathiques, mais surtout des combats contre des potes à deux niveau : ceux qui ne savent pas jouer pourront enchaîner des combos automatiques en spammant le même bouton, tandis que ceux qui en ont sous le stick pourront faire des tricks hallucinants. Malgré tout, la complexité des jauges et la quantité des informations à l’écran pourront déstabiliser le néophyte, prévoyez quand-même un minimum d’explications à fournir à votre sac de frappe partenaire de jeu avant qu’il ne prenne du plaisir.