
Art & Magic – le jeu vidéo artisanal
Arrivée au bout des capacités techniques de l’Amiga, l’équipe recherche plus d’aisance pour ses envies : l’arcade. Si le terrain de jeu des luna-park semble passionnant, la réalité est dure. L’arcade, cette dimension rock ’n roll dans l’imaginaire collectif. Illusion, Art & Magic découvre un monde de businessmen qui n’en ont rien à faire du jeu vidéo. Le fric est roi dans l’arcade, c’est dans la nature même des bornes.
Or, Art & Magic saisit mal la progression pièce-après-pièce et crée « une aventure épique, un truc immersif. Un jeu sur la longueur… L’arcade n’était pas un endroit pour ça. Spellsinger n’était pas étudié pour ce marché-là. […] On a fait un truc pour nous. C’est un jeu console qu’on a fait. »
À ceci près que Spellsinger n’a jamais été véritablement fait…
En attendant, l’éditeur demande du concret, qu’on « valide la technologie ». Pas forcément un projet ambitieux… mais Art & Magic ne se refait pas. Pour un projet secondaire, l’équipe se casse la tête et signe le premier bon jeu de tennis visuellement réaliste. Elle s’amuse aussi avec la motion capture et la digitalisation. Mais est-ce que ce projet intermédiaire n’était-il pas justement trop prenant en plein développement de Spellsinger ?
« Ultimate Tennis a été fait très vite. » Le développement ne part pas de rien : « les règles du tennis, elles existent, et on commençait à maîtriser la technologie. Il y avait juste le problème de l’animation ; il a fallu mettre en place quelques techniques. »
Ultimate Tennis se vend bien, très bien même pour le marché de l’arcade. C’est le premier jeu qui rapporte à l’équipe « un vrai salaire ». Jusqu’alors, ses membres ont toujours eu « le minimum pour exister ». Dans ces conditions, est-ce qu’on se dit qu’on va faire un smash au prochain jeu et être financés pour les cinq prochaines années ? « À chaque fois, on se dit ça (rires). Et puis, on se dit, merde qu’est-ce qu’on va faire ? Et ben, on va en faire un autre ! Qu’est-ce qu’on sait faire ? On sait faire que ça… Ceci dit, on s’en foutait d’être juste financièrement, alors qu’aujourd’hui, on se dit que des éditeurs ont exploité le rêve. »
Dans l’intervalle, Art & Magic développe vite fait un jeu de football préhistorique au look sympa. Pour permettre aux joueurs de se déplacer dans la profondeur du terrain, des modèles 3D sont créés et leurs contours sont recopiés en 2D. Littéralement recopiés, comme le révèle cette anecdote : Iwan Scheer, l’animateur du studio retrace les personnages à même l’écran sur des stations hors de prix acquises pour l’occasion ! « Il utilisait même du Tipp-Ex ! »
À mi-chemin entre Super Sidekicks et Soccer Brawl, Stone Ball se distingue des autres productions du studio par son style humoristique et sa volonté parodique.
Cheese Chase est probablement le jeu le plus classique d’Art & Magic. L’éditeur demande toujours de nouvelles sorties, et l’équipe s’exécute via ses nouveaux employés. Le résultat est un jeu de tableau, vieux comme le jeu vidéo mais sur plusieurs écrans.
Dans le même esprit, Western Shooting est une autre production anecdotique du studio. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un jeu de tir dans une ambiance far west. Bon, et Spellsinger alors ?
Spellsinger ?
Quand Spellsinger est montré à l’extérieur, les années ont passé. Sur un salon arcade, Spellsinger tient un stand juste à côté de… Killer Instinct. La claque de Rare éblouit tout le monde, jusqu’à l’éditeur de Spellsinger qui se retourne vers ses créateurs belges et leur dit « mais enfin, c’est ça qu’on veut ! » en tendant le doigt vers Killer Instinct.
Trop tard pour Spellsinger, qui semble ringard par rapport aux nouveautés. Jamais, il ne sortira des cartons. Quel dommage quand on voit la force visuelle du titre… Mais pourquoi ne pas marquer l’essai maintenant et distribuer Spellsinger sur les plateformes de téléchargement ? Une hypothèse qui amuse Yves Grolet : « Si tu me donnes 100.000 euros, oui pourquoi pas… En réalité, le jeu était loin d’être terminé. Et puis, les sources graphiques ont disparu. »
cyborgjeff le 10/04/2015
Hé bien, hasard du calendrier, je lisais justement la semaine dernière un article à leur sujet dans le Pix n Love 16. Ils nous raconte l’histoire de Spellsinger, grand projet d’Art & Magic qui n’est malheureusement pas sorti des sous-sols. Une épopée magique de notre bassin liègeois
https://www.youtube.com/watch?v=WT_UCNGrKdM
cyborgjeff le 10/04/2015
Aaah, je n’avais pas vu qu’il y avait 3 pages à cet article… je m’y remets 😉
Aerticum le 10/04/2015
J’y étais pour une bonne partie avec toi, et c’était un super chouette moment. J’aime ce genre d’histoire pleine d’anecdote 🙂 Ces gens étaient vraiment sympa
Pacman Syndrome : du jeu-vidéo made in Belgium – Les Mondes de Cyborg Jeff le 06/08/2018
[…] Présentation à Psygnosis sur un salon. La chouette (le logo de Psygnosis) était un hasard, « mais ça leur a bien plu chez Psygnosis ». La technique des scrollings parallaxes impressionne aussi l’éditeur, à tel point qu’il appelle les développeurs de Shadow of the Beast à la rescousse. Et il leur demande comment ces Belges ont fait ça. Les stars de Shadow of the Beast observent… réfléchissent… assènent « We don’t know ». Yves Grolet et Frank Sauer en retirent de l’assurance et quittent l’Angleterre plus forts, non sans avoir dévalisé les librairies locales pour leurs manuels de programmation. « On ne trouvait rien chez nous à l’époque. » (Un très bon dossier à lire sur Press-Start) […]