Air Twister

Air Twister

L’accueil dans un jeu vidéo est un aspect parfois négligé. Combien d’écrans-titres se contentent aujourd’hui d’afficher le nom du jeu sur un fond noir, avec une invitation clignotante à appuyer sur « Start ». En revanche, chez Air Twister, on sait recevoir ! Après un écran de lancement bien kitsch, c’est un pastiche de Bohemian Rhapsody qui nous souhaite la bienvenue en musique. Si vous ne supportez pas le rock progressif, vous allez souvent écarquiller les yeux d’étonnement devant les choix musicaux du compositeur Valensia. Par contre, si vous n’êtes pas contre un (long) solo de Brian May ou un (long) morceau de King Crimson de temps en temps, l’accompagnement musical vous sera même bizarrement agréable. Et puis après tout, Yu Suzuki est un fan de l’artiste néerlandais Valensia.

Attendez, on a bien dit « Yu Suzuki », Monsieur Shenmue ? Oui tout à fait, mais en dehors de la série révolutionnaire Shenmue, le créateur japonais était surtout connu auparavant pour ses jeux d’arcade chez Sega. Si ses Virtua Fighter et Racing semblent bien éloignés d’Air Twister, Yu Suzuki a exploré les jeux de tir plus tôt dans sa carrière, avec After Burner et surtout Space Harrier. Ce dernier, qui remonte à 1985 quand même, a servi de modèle pour le nouveau titre du vrai Maître Sega.

Air Twister est un shoot ‘em up en 3D de la famille des « rail shooters », dans lequel le joueur incarne un personnage volant. C’est la formule de Space Harrier qui, en fin de compte, n’a pas fait beaucoup de petits, hormis peut-être le rythmique Rez sur Dreamcast. Le succès de 1985 n’est toutefois pas le seul souvenir Sega qu’évoque Air Twister. Les illustres After Burner et Panzer Dragoon avaient déjà adopté le verrouillage de cibles multiples et, comme eux, Air Twister combine un tir direct et un marquage de cibles multiples. L’association fonctionne très bien à la manette, précisons-le parce que le jeu a vu le jour sur iPhone et iPad en mode tactile.

Votre personnage est une princesse qui s’appelle Arch et qui vole, ce qui n’est pas très courant si j’en crois les émissions de Stéphane Bern. Sa planète est menacée par une invasion de gros méchants, qui volent eux aussi tant qu’à faire. Et même qu’à la fin de chaque niveau, il y a un méchant encore plus grand que les autres. Consciente qu’elle ne rétablira pas la paix en diffusant du Laurent Voulzy sur toute la planète, la princesse Arch part virevolter aux quatre coins de son monde avec une arbalète laser sous le bras.

« Save the Planet, get ready ! » nous lance-t-on en début de partie. C’est le « Welcome to the Fantasy Zone, get ready ! » de Space Harrier en un peu plus sérieux. Pourtant, quelques minutes suffisent pour se rendre compte que la planète survolée est bien une « fantasy zone » où l’herbe semble très bonne. Les décors, les ennemis, les couleurs, votre apparence, tout sent l’hallucination. En outre, la musique de Valensia est tantôt planante, tantôt baroque. Cela donne un ensemble très kitsch, ou plutôt grotesque dans le bon sens du terme (oui ça existe dans ma tête). Plus d’une fois, j’ai fait le parallèle avec l’ambiance de Bayonetta, surtout lors des combats de boss.

Si quelques boss sont mous, la plupart font du bon travail. Et surtout ils ont un certain sens du fair play : entre deux attaques chorégraphiées, ils vous laissent le temps de viser leurs points sensibles jusqu’à ce que mort s’ensuive. À l’intérieur des niveaux, on ne s’ennuie pas non plus, d’autant plus si on essaie de ne rater aucune vague d’ennemis pour gonfler le score. Le scoring ne sera d’ailleurs pas une quête vaine, puisqu’un meilleur score octroiera davantage de points à dépenser sur une sorte de jeu de l’oie.

C’est peut-être là que réside la principale faiblesse d’Air Twister. À mon sens, il est très difficile d’atteindre la fin du mode histoire sans améliorer son personnage. Après chaque game over, un passage par ce fameux jeu de l’oie sera franchement obligatoire pour gonfler sa jauge de vie, par exemple. J’aurais préféré un système juste dès le départ, avec des points de vie à récupérer en pleine partie. Mais soit, qui suis-je pour remettre en cause un choix de design de Yu Suzuki ? Et, pour être honnête, je n’ai pas craché sur les armes déblocables, les boucliers et ralentis temporaires, etc. Pour me contredire jusqu’au bout, la page des bonus comprend un mode arcade classique sans toutes ces babioles bien trop pratiques à force. Les autres modes bonus sont anecdotiques à mes yeux, et je ne dois pas être le seul à le penser.

En guise de clin d’œil rétro, Air Twister inclut aussi des intermèdes tendance pause café : deux stages bonus sur la longueur d’une partie complète. Moins hypnotiques que les phases de chevauchée sur une « chenille » géante dans Space Harrier, ces stages bonus reviennent à un passé encore plus lointain. C’est l’époque de Galaxian qui revit ici, avec des grappes d’ennemis qui dansent devant vos yeux avides de score parfait. Certaines séquences m’ont aussi carrément rappelé l’ancêtre Space Invaders, et les insectes du niveau dans la nature m’ont fait une piqûre de rappel d’Apidya sur Amiga ou de Kolibri sur 32X. Bref, Air Twister peut vous donner un coup de jeune, et rien que ça vaut la peine de lâcher 25 euros juste avant 2024.

Note

13/20

Air Twister ne sera pas un grand classique à ranger dans l’armoire à trophées de Yu Suzuki. Mais qui en attendait autant à vrai dire ? En l’état, c’est un bon Space Harrier-like qui ne se refuse aucun plaisir, certainement pas dans sa musique improbable à écouter au moins une fois dans sa vie. Sans prétention ni fausse note majeure, Air Twister est un bon divertissement à apprécier sur tous les supports de jeu.

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