Final Fantasy VII Remake

Final Fantasy VII Remake

Je dois vous faire une confession : je ne suis pas très à l’aise, là, maintenant. Savoir faire la part des choses entre l’objectivité et la subjectivité, pouvoir laisser ses goûts de côté pour aborder un jeu et en rédiger un test, cela fait partie intégrante du quotidien de la rédaction de Press-Start. Pourtant, en ce moment même face à mon clavier, je ressens une pression énorme sur mes épaules. Effectivement, on a tous connu des titres qui nous ont marqués au fer blanc, déclencheurs de passions irrationnelles au point d’avoir défini nos attentes et nos goûts des années plus tard. Trois jeux rentrent parfaitement dans cette catégorie pour moi : Super Mario 64, Zelda : Ocarina of Time et… Final Fantasy VII ! Le titre de Squaresoft est si cher à mon cœur que plus que jamais la crainte de laisser la subjectivité prendre le pas sur ce test me ronge.

Le début d’une superbe aventure.

Mais cette pression doit être bien petite face à celle qui a dû régner au sein des studios de développement de Square Enix. Peut-être que les nouvelles générations de joueurs n’en sont pas spécialement conscientes vu l’aura culte clairement établie du jeu, mais il y a bel et bien eu un avant et un après Final Fantasy VII, sa sortie mondiale ayant eu l’effet d’un Big Bang sur l’exportation du RPG en dehors des frontières nippones. Ce n’est pas sur le remake d’un jeu parmi tant d’autres dans leur catalogue de licences qu’ils ont dû bosser, non : c’est sur celui du plus grand jeu Square de tous les temps ! Vous allez me dire « Et voilà, on est à peine au deuxième paragraphe que ce brave Mr Mandale se laisse déjà aller à l’euphorie subjective » mais pourtant rares sont les Final Fantasy à dégager une aura aussi importante que le septième épisode, au point d’avoir notamment joué en la défaveur de Final Fantasy VIII qui avait la lourde tâche de sortir juste après le raz-de-marée FFVII.

La fameuse démo technique de FFVII sur PS3.

Cela fait d’ailleurs bien longtemps qu’un remake des aventures de Cloud est sur toutes les lèvres : lors de l’E3 2005, les équipes de Square balancent une véritable bombe atomique via une démo technique visant à montrer ce qu’elles étaient capables de faire sur Playstation 3. Cette tech-demo sera tout sauf anodine : il s’agit ni plus ni moins d’un remake de la cinématique d’introduction de Final Fantasy VII. Il n’en fallait pas plus pour que la fan-base entière s’enflamme à rêver qu’il ne s’agissait pas que d’une démo technique mais que cette superbe réinterprétation du jeu devienne réalité. Une envie qui n’en sera que renforcée par ce que Square nous a présenté en tant que « Compilation of Final Fantasy VII » et ce au fil des sorties des différentes œuvres regroupées sous cette appellation : que ce soit le très sympathique film d’animation Advent Children, l’animé Last Order, l’excellent Crisis Core sur PSP voire le pourtant mitigé Dirge or Cerberus sur PS2, chaque nouvelle pièce apportée à l’édifice ne faisait que renforcer l’envie de retourner sur un Final Fantasy VII sublimé aussi bien par les nouvelles technologies que par l’évolution de la direction artistique du monde de Tetsuya Nomura.

Final Fantasy VII : Advent Children

Une fois terminée la Compilation, silence radio de la part de Square Enix jusqu’à l’E3 2015 où sera annoncé en fanfare lors d’une conférence Sony mythique, aux cotés de Shenmue III et The Last Guardian, Final Fantasy VII ! Le remake tant souhaité revenait sur le devant de la scène dans un trailer époustouflant. Loin de moi l’envie de vous retracer la chronologie complète du développement de ce remake, mais il me semblait important de mettre en lumière toute l’importance et l’aura de Final Fantasy VII. Nous voici donc, quasiment cinq ans plus tard, dans un monde où un rêve vieux de quinze ans est devenu réalité : Final Fantasy VII Remake est sorti !

Cette fois-ci, ça y est, Cloud est de retour !

Et n’ayons pas peur des mots : à une époque où remakes, remasters et autres ultimate / definitive editions n’ont jamais eu autant le vent en poupe, l’histoire est amenée à se répéter. Oui, tout comme il y a eu un avant et un après Final Fantasy VII, il en va de même pour ce Remake. Car les équipes de Square Enix ne se sont pas contentées de juste « refaire le même jeu en plus beau », que du contraire : FFVIIR est une réelle remise à plat et reconstruction totale de l’aventure. Cela n’a pas dû vous échapper d’ailleurs, tant les choix adoptés par la firme nippone reine du RPG ont pu faire débat auprès des plus conservateurs. Les deux plus évidents sont bien entendu le système de combat disant adieu au tour par tour de 1997 et l’annonce d’une segmentation du jeu en plusieurs titres face à l’ampleur de la tâche à accomplir. Maintenant que nous avons enfin pu jouer au jeu, ces choix font plus que sens et Square Enix vient d’établir un nouveau standard dans le remake le plus pur, réelle réécriture autour de nouvelles mécaniques venant faire rougir tous ces portages fainéants.

Fainéant, cet adjectif pourrait bien qualifier les propos des détracteurs du jeu quand Square Enix a annoncé que la première partie de Final Fantasy VII Remake reprendrait la trame de Midgard jusqu’à l’évasion de la tour Shinra et pour cause : dans le jeu originel, Midgard n’était que le début de l’aventure, un prologue parcouru en une moyenne de 7h avant de partir explorer le monde et continuer l’aventure. C’était sans compter sur l’ambition de Tetsuya Nomura qui profite de l’occasion pour prendre le temps de bien plus développer son monde et son histoire. Ainsi, si le jeu prend effectivement fin au moment où Cloud et ses amis, fraîchement échappés des locaux de la Shinra, se retrouvent face à l’immensité du monde qu’il leur reste à explorer, il m’aura fallu plus de quarante heures pour le terminer et à aucun moment je n’ai eu l’impression que les évènements étaient volontairement tirés en longueur pour diluer une aventure de 7h en un jeu six fois plus long.

Si l’histoire reste fondamentalement la même, l’enchaînement des évènements est bien plus naturel avec de nouveaux segments visant à étoffer l’expérience et développer bien plus les environnements et personnages. Jamais, même dans Advent Children, Midgard ne nous aura semblé aussi vivant et cohérent que dans ce remake ! Il n’y a qu’à voir ses rues troublées par l’explosion du réacteur Mako, peuplées de citoyens abasourdis et de patrouilles de sécurité, pour s’en rendre compte. Un soin tout particulier a également été apporté à l’écriture des personnages. Pour citer mon confrère Gautoz de Gamekult, on comprend enfin à quoi servait Advent Children 15 ans plus tôt : les protagonistes de FFVIIR adoptent tout naturellement les traits qui les définissaient dans le film. Un soin similaire a également été apporté aux PNJ qui graviteront autour du groupe. Impossible de ne pas citer le trio Biggs, Wedge et Jessie de Avalanche, qui resteront bien plus dans les mémoires qu’en 1997 de par leur très importante mise en avant dans ce remake. Mais ils ne sont pas les seuls et Cloud sera amené à côtoyer de drôles de spécimens hauts en couleurs au fil de l’aventure, notamment à Wall Market.

Les séquences rajoutées font sens et ne donnent jamais l’impression d’avoir été fourrées au chausse-pied, à l’exception d’un personnage bien précis – je ne parle pas de celui auquel on pourrait penser dès la cinématique d’introduction vu que tout s’explique lors d’un final sur lequel je ne reviendrai volontairement pas ici par souci de spoil évident – il s’agit bien sûr de Roche. Si ce motard semblant sortir tout droit de Advent Children (me faisant me demander si les futures parties du jeu aborderont la bande de Kadash) fait tout à fait sens en termes de gameplay, venant apporter un boss dans le ton du segment où il apparait, il repartira aussi vite qu’il est venu pour ne plus jamais revenir. Peut-être le retrouvera-t-on dans une prochaine partie mais compte tenu de sa première apparition, je m’attendais à le voir débarquer lors de la fuite en moto à la fin du jeu.

La refonte du gameplay est quant à elle magistrale ! Il faudra bien entendu un peu de temps pour en appréhender toutes les subtilités, ce qui peut donner une impression de brouillon bourrin lors des premiers combats de boss, mais une fois maîtrisé chaque combat devient un pur plaisir et parvenir à assimiler les patterns des boss et systématiquement y répondre le plus efficacement possible est tout simplement jouissif. Quatre personnages sont jouables tout au long de l’aventure : Cloud bien entendu, mais également Barret, Tifa et Aerith, et un soin tout particulier a été appliqué pour les différencier manette en main. Cloud peut changer de stance, le rendant plus puissant au détriment de sa vitesse de déplacement, et lui permettant de contrer les attaques au corps à corps mais le rendant plus vulnérable aux attaques à distance. Tifa peut enchaîner un coup plus puissant en fin de combo. Barret dispose d’un tir explosif soumis à une barre de cooldown sur laquelle il pourra influer durant le combat. Aerith, quant à elle, pourra charger une attaque de zone à distance et dispose de compétences lui permettant d’augmenter l’efficacité de sa magie et de celle de ses alliés.

Les combats se jouent donc en temps réel, avec garde et esquive à gérer pour un feeling offrant le meilleur de Final Fantasy XV et Kingdom Hearts. Héritage de Final Fantasy VII oblige, chacun des trois personnages de notre équipe dispose d’une barre de Active Time Battle en deux segments. Ces segments se chargent durant les combats et donnent accès une fois pleins aux différentes possibilités du menu Commandes. Utiliser une compétence, lancer un sort ou recourir aux objets se fera donc grâce à la jauge ATB. Les compétences sont des attaques spéciales que nos personnages pourront apprendre en s’équipant de nouvelles armes et qui une fois maîtrisées pourront même être lancées peu importe votre arme équipée ; certaines compétences n’utilisent qu’un segment d’ATB, d’autres permettent de choisir d’utiliser les deux segments pour plus d’efficacité tandis que les compétences les plus puissantes nécessitent obligatoirement deux segments. Les sorts, toujours obtenus grâce à l’ingénieux système des Matérias qui fait son grand retour, ne nécessitent qu’un segment ATB mais consommeront bien entendu des MP. Comme vous pouvez le deviner, utiliser un objet consommera également un segment de cette barre qui viendra réellement faire la différence au combat.

Le joueur contrôle le personnage chef d’équipe tandis que les alliés vont faire leur vie sur le champ de bataille, à alterner attaques de base et défense, ce sera donc au joueur de leur donner l’ordre d’utiliser leur barre ATB via des commandes intuitives attribuées par personnage aux gâchettes. La barre d’ATB du personnage incarné par le joueur aura tendance à se remplir plus rapidement, parce que le joueur sera immanquablement plus actif que ses alliés contrôlés par l’IA. Je vous conseille de ne pas faire la même erreur que moi et de directement prendre le pli de changer de personnage régulièrement durant les combats, en appuyant sur les flèches gauche et droite de la croix directionnelle, afin d’optimiser le remplissage des segments ATB et d’augmenter le potentiel offensif et défensif de l’équipe !

Les invocations répondent bien entendu présentes mais sont désormais soumises à des conditions assez similaires à FFXV : concrètement, une jauge d’invocation apparaitra en fonction de la durée du combat. Une fois pleine, il sera possible pour le prix d’un segment d’ATB d’un des personnages équipés d’une Matéria d’invocation (il n’est désormais plus possible d’attribuer plus d’une invocation par personnage) de faire se joindre à la bataille Ifrit, Shiva et autres joyeusetés déjà présentes dans Final Fantasy VII. Une fois l’invocation présente sur le terrain, n’importe quel personnage peut utiliser ses segments d’ATB pour utiliser les commandes qui lui sont dédiées, tandis que la jauge d’invocation diminuera progressivement durant la présence de l’Esper sur le terrain. Une fois la jauge vide, l’invocation partira en lâchant son attaque ultime sur l’ennemi. À ne pas négliger non plus, une mécanique également présente dans FFXV mais venue tout droit de Final Fantasy XIII : la barre de fragilité et l’état de choc ! Exactement comme dans le 13ème opus, chaque ennemi dispose d’une barre de fragilité en plus de sa barre de vie, qui grimpera au fil des attaques. Certains ennemis sont plus sensibles aux attaques magiques, d’autres aux attaques physiques, et certaines compétences des personnages disposent d’un potentiel de choc venant faire grimper cette barre. Une fois pleine, l’ennemi sera en état de choc : incapable de bouger le temps que cette jauge redescende à zéro, il verra également sa défense se réduire à peau de chagrin, vous permettant d’infliger de très importants dégâts pouvant renverser une bataille. À ne surtout pas négliger lors des combats de boss, ces derniers alternant les phases en exposant plus ou moins leurs faiblesses au fil de l’affrontement : un état de choc bien placé pourra interrompre un ennemi préparant une attaque dévastatrice. Enfin, les Limit Break – ici renommés techniques de Transcendance – sont bien entendu de la partie et n’ont pas changé dans leur fonctionnement : plus un personnage encaisse de dégâts, plus sa barre de limite monte pour permettre une fois pleine de lancer une technique très puissante qui sera même mise en scène à coups de caméras dynamiques si c’est le personnage actuellement contrôlé par le joueur qui l’utilise. Petit détail sympa, les techniques de transcendance ne consomment pas d’ATB et peuvent être utilisées à n’importe quel moment une fois la jauge pleine !

Final Fantasy VII Remake réalise donc un sans-faute sur les deux points suscitant le plus de craintes auprès des fans : construire un jeu complet autour du seul segment de Midgar et abandonner le tour par tour. S’il y a bien un point sur lequel personne ne doutait par contre, c’était la réalisation technique. Car pendant 15 ans, c’est ce simple aspect technique qui justifiait l’existence du remake auprès des fans, et comme les trailers le laissaient penser, le jeu est magnifique ! Certes, à de très rares moments certaines textures renvoient plus à la démo technique PS3 qu’à un jeu sortant en fin de vie de la PS4, il faudra cependant vouloir chercher la petite bête pour ne voir que ça tant la réalisation du jeu témoigne d’un réel travail d’orfèvre. Au risque de me répéter, s’attaquer au remake du jeu le plus important de toute l’existence de Square n’était pas une mince affaire, et quand on voit le degré de finition appliqué aux animations des personnages, leurs émotions dégagées, les mécaniques de combat, toute la réorchestration des compositions de Nobuo Uematsu dirigée ici par Masashi Hamauzu et Mitsuto Suzuki, on se rend compte que toutes les personnes ayant bossé sur le projet ont vraiment donné leur maximum pour livrer un jeu à la hauteur de la légende. Même les doublages font un maximum appel aux acteurs ayant prêté leur voix aux personnages dans Advent Children, avec une VF presque aussi bonne que l’excellent doublage de Final Fantasy XV.

Reste une question à éluder, et j’avoue que je suis sans doute mal placé pour y répondre mais… Vu à quel point l’influence de Compilation of Final Fantasy VII est assumée par ce remake, une compilation qui s’adressait directement aux fans du jeu, un néophyte peut-il se lancer dans l’aventure et l’apprécier pleinement sans avoir joué à Final Fantasy VII ? Pas que ça m’ait déplu, au contraire, ces constantes références qu’elles soient visuelles ou sonores ont vraiment été la cerise sur le gâteau qu’est cette redécouverte sublimée du jeu que j’ai tant aimé. Et si je pense que le jeu est tellement bon qu’il ne peut qu’être apprécié, je ne peux pas m’empêcher de me demander si une découverte totale de Final Fantasy VII par ce remake ne pourrait pas sembler par moments hermétique. À nouveau, je ne m’étendrai pas sur la fin du jeu mais cette dernière en particulier pourrait bien créer une scission entre les deux publics vis-à-vis du jeu.

Note

20/20

Square Enix frappe un très grand coup avec ce Final Fantasy VII Remake. Les équipes en charge du projet n'ont pas eu peur de déconstruire leur propre mythe pour mieux le réécrire et donner plus que jamais du sens au mot Remake à une époque où les éditeurs ont tendance à se contenter de simples portages épinglés Remake ou Remaster. Tout en reposant sur des mécaniques de gameplay finement rodées, le jeu est une véritable déclaration d'amour aux fans de Final Fantasy VII qui marquera son époque comme l'a fait son grand frère avant lui. Vivement la suite !

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