Final Fantasy VIII Remastered

Final Fantasy VIII Remastered

On n’oublie jamais son premier Final Fantasy, souvent au point que, tout naturellement, ce premier contact avec la série de Square incarne purement et simplement notre épisode favori de la série. Comme beaucoup de joueurs européens, c’est avec Final Fantasy VII que j’ai découvert cette saga qu’on appelle affectueusement FF, et c’est assurément mon chouchou dans la série – comme c’est original vous me direz. Nous, public européen, ne le savions pas forcément à l’époque vu les six épisodes à côté desquels nous sommes passés, mais le twist qui offre son originalité à Final Fantasy, c’est que chaque nouvelle itération propose un nouvel univers et une remise à plat complète. Bien que chiffré septième fantaisie finale, FFVII n’était pas la suite de FFVI qui n’était elle-même pas la suite de FFV et je pense que même si vous n’êtes pas joueur de Final Fantasy, vous avez compris l’idée. Sauf qu’il faut se replacer 20 ans en arrière, quand Final Fantasy VIII est sorti sur Playstation : les aventures de Cloud ont marqué de très nombreux joueurs (et au risque de me répéter, votre humble serviteur en fait partie) qui attendent du coup le prochain Final Fantasy de pied ferme.

Il suffit de se balader sur les forums de discussion consacrés à la série pour constater très rapidement que Final Fantasy VIII se traine, encore aujourd’hui, une mauvaise réputation. Il s’agirait du petit canard boiteux de la trilogie Playstation, celui qu’on considère moins marquant qu’un FFVII et moins envoûtant qu’un FFIX. Preuve ultime de ce désaveu, si Final Fantasy VII et IX sont ressortis sur consoles de nouvelle génération et PC ces dernières années, le VIII quant à lui se montrait des plus discrets… Jusqu’à l’E3 dernier où, non content de nous dévoiler enfin du gameplay pour le remake de FFVII, Square Enix a annoncé la sortie d’une version remasterisée du 8ème épisode ! Vous l’aurez compris, cette introduction maladroite nous mène tout droit vers ce Remaster de Final Fantasy VIII, sorti en septembre dernier sur PS4, Xbox One, Switch et PC, que nous allons analyser pour répondre ensemble à une question : et si le principal défaut de Final Fantasy VIII était d’être sorti après un septième opus au succès démesuré ?

Car à sa sortie, FFVIII ne manquait pas d’arguments, et s’il y en a bien un qui a mis tout le monde d’accord, ce sont ses graphismes. Tout d’abord en jeu, car si FFVII – en tant que premier opus à sortir sur Playstation – avait un peu le cul entre deux chaises en alternant entre une représentation réaliste des personnages durant les phases de combat et un style SD hérité des épisodes précédents mais adapté en 3D pour l’exploration, Final Fantasy VIII adoptait quant à lui des proportions réalistes en toute circonstance, arborant une direction artistique bien plus cohérente. Il réutilise la même formule de déplacements dans des décors pré-calculés mais la peaufine dans ses moindres détails, sans que jamais ses personnages ne semblent en décalage vis-à-vis de leur environnement. Mais la principale force de Final Fantasy VIII dans le domaine des graphismes, ce sont ses cinématiques. 20 ans plus tard, nombreux sont les joueurs à se souvenir de la véritable claque en pleine figure qu’était l’introduction du jeu nous présentant son héros Squall et son rival Seifer en plein duel sur des envolées lyriques dont Nobuo Uematsu a décidément bien le secret. Osez me dire que cette cinématique ne vous donne pas envie de saisir la manette et vous lancer dans l’aventure FFVIII, que ce soit sur PS1 en 1999 ou aujourd’hui via ce remaster ?

L’ambiance du jeu se veut aussi plus adulte que son prédécesseur. Fatalement, les équipes de développement de Squaresoft se sont bien rodées et peuvent pousser la Playstation bien plus loin qu’avec Final Fantasy VII (qui était, je le rappelle, le premier FF à voir le jour sur une console autre que Nintendo et à adopter la 3D). Aussi ne doivent-elles plus jongler avec des artifices tels que les tirs en l’air de Barret pour faire ressentir au joueur les sentiments et réactions des protagonistes. Final Fantasy VIII aborde des sujets assez graves, tels que la militarisation de la jeunesse, le destin, la confiance en soi et en ses proches… Pas que Final Fantasy VII soit un jeu « de gamins », ses enjeux sont eux aussi emprunts d’une certaine gravité et risquent de faire écho à notre monde actuel quand son remake tournera sur nos consoles en mars prochain, mais quand je vois que même vingt ans plus tard une frange très importante du public ne voit toujours en FFVIII qu’une romance adolescente à l’eau de rose, je me dis qu’ils sont malheureusement passés complètement à côté de ce que le jeu avait à leur offrir.

Bien qu’elles fussent déjà présentes dans les FF depuis plusieurs itérations, c’est vraiment avec le huitième épisode que les invocations ont acquis leurs lettres de noblesse. Toujours en peaufinant le travail effectué sur le précédent épisode, les interventions de ces puissantes divinités – ici nommées Guardian Forces – mettent le paquet niveau mise en scène et les attaques de chaque nouvelle G-Force recrutée mettent la barre plus haut pour la suivante, mais ce serait réducteur de les résumer à cela car désormais la quasi-intégralité des mécaniques de jeu reposent sur elles. C’est un point qui a perturbé pas mal de joueurs, et je peux les comprendre tant le système de Materia que l’on retrouvait dans FFVII était beaucoup plus instinctif, mais l’évolution et la spécialisation de nos personnages passent obligatoirement par les Guardian Forces. Concrètement, une fois une G-Force recrutée, il faudra l’associer à un personnage de notre équipe, lui permettant de bénéficier des pouvoirs conférés par la créature. Car « tout nu », un personnage ne pourra qu’attaquer, et il faudra obligatoirement recourir à l’association avec une ou plusieurs invocations pour pouvoir étoffer sa liste de commandes : invoquer la G-Force au combat, utiliser des objets, voler et utiliser de la ma… Voler ? Je me souviens que j’avais bien du mal avec ce système à l’époque, et bien que je le comprenne mieux désormais, je dois bien reconnaitre qu’il est assez peu intuitif : nativement, nos personnages ne peuvent pas apprendre de sorts et ne disposent même pas de MP ! L’obtention des sorts se fait uniquement via la commande Voler afin de s’approprier les sorts de l’ennemi visé. De là, deux options s’offrent à nous : soit lancer directement le sort dérobé (avec la possibilité de cibler n’importe quel ennemi et pas uniquement celui à qui on vient de voler le sort), soit le stocker.

On peut bien évidemment stocker les sorts pour les utiliser plus tard contre d’autres ennemis, pour par exemple profiter des faiblesses élémentaires à la condition d’avoir équipé notre personnage et de la compétence Voler et de la compétence Magie (attention, vous ne pouvez équiper que trois compétences, il faudra ainsi faire des choix stratégiques et penser à spécialiser vos différents personnages en tenant compte de cette limitation). Mais la magie revêt une importance bien plus capitale quand elle est associée aux statistiques de nos personnages : chaque Guardian Force permet d’associer des sorts à tel ou tel trait de statistique afin de les booster : attaque, attaque magique, défense, vitesse et j’en passe, ce sont tous les traits de statistique classiques du RPG qui peuvent être amplifiés pour peu que votre G-Force le permette. Et si elle ne le permet pas encore, ce n’est qu’une question de temps ! Au fil des combats remportés, nos personnages reçoivent des points d’expérience liés à la traditionnelle montée de niveau tandis que nos invocations reçoivent des points de compétences, automatiquement attribués à la compétence actuellement en cours d’apprentissage. Il est bien entendu possible de choisir ces compétences à apprendre pour, une fois la jauge de points de compétence remplie, obtenir définitivement ladite capacité. De plus, pour pallier l’absence de points de magie, l’invocation des Guardian Forces au combat est régie par un système de double barre de vie. Tant qu’un personnage se bat par ses propres moyens, ce sont les points de vie du personnage qui encaisseront les attaques ennemies, tandis que si le personnage invoque l’une de ses G-Forces, durant le temps requis d’invocation, ce sont les points de vie de la créature en question qui viendront tanker les dégâts que pourrait subir notre personnage. Il est d’ailleurs très important de maitriser le vol de magie, l’évolution de nos invocations et l’association de magie aux statistiques de nos héros pour progresser dans l’aventure car Final Fantasy VIII introduit une mécanique de mise à niveau : contrairement aux précédents FF, il n’existe pas de zones à proprement parler avec des adversaires plus puissants que nous. Le niveau des ennemis et autres boss est automatiquement calculé sur celui de notre équipe, et c’est bel et bien l’optimisation de nos statistiques qui nous permettra de nous distinguer au combat et poursuivre notre quête.

Fidèle à la tradition, Final Fantasy VIII placera d’ailleurs plusieurs personnages attachants dans notre équipe. Que ce soit le héros renfermé Squall, Zell le petit nerveux au grand coeur, le charismatique Irvine toujours prêt à draguer ces dames, Quistis qui peine un peu à établir une frontière entre amitié et professionnalisme alors qu’elle enseigne dans l’école de Balamb Garden où étudient nos premiers personnages, le mystérieux Laguna et son thème musical entêtant ou encore Edea la sorcière antagoniste bien plus liée à nos héros que l’on ne pourrait le penser, le casting est à la hauteur de ce qu’on est en droit d’attendre d’un FF et c’est tout au long des quatre disques composant le jeu que nous accompagnerons ces héros hauts en couleur. C’est également dans Final Fantasy VIII que l’on retrouvera ce qui est selon moi le meilleur « jeu dans le jeu » de tout Final Fantasy : le Triple Triad. C’est un jeu de cartes hautement addictif se jouant sur un terrain de neuf cases pour tout autant d’endroits où poser ses cartes représentant héros et créatures. Chaque carte est dotée de quatre valeurs associées aux quatre bords de la carte, représentant la puissance de l’unité représentée sur cette dernière. S’il suffit dans un premier temps de placer une carte de valeur plus élevée à côté d’une carte adverse pour remporter le point, c’est au fil de l’aventure et des régions traversées / parties disputées auprès des PNJ que les règles s’étofferont en introduisant entre autres des affinités élémentaires et possibilités de combo. Même 20 ans plus tard, même après le Tetra Master de Final Fantasy IX reposant sur les mêmes bases en plus complexe, le Triple Triad reste toujours aussi agréable et efficace et croyez-moi, que ce soit à l’époque sur Playstation ou aujourd’hui via ce remaster, j’en aurai passé des heures à taper le carton, rythmées par le très bluesy Shuffle or Boogie.

Mais concrètement, ce remaster, il apporte quoi ? Le plus évident, c’est le lissage graphique appliqué sur l’ensemble des décors précalculés et modèles 3D du jeu, venant lui offrir une seconde jeunesse. Le plus impressionnant, ce sont les personnages : j’ai vraiment été bluffé, après avoir revécu la mythique cinématique d’intro, de découvrir un Squall semblant sortir de Final Fantasy X ! Adieu la pixelisation abusive des modèles 3D de 1999, nos protagonistes se parent de visages détaillés dignes du travail de Square sur ses jeux Playstation 2. Si, à l’instar des cinématiques, les décors précalculés ne bénéficient que d’un upscaling pour pouvoir être affichés dignement sur des écrans actuels, la combinaison de cet upscale et des modèles 3D affiche un rendu très propre qui sera le principal argument pour se relancer dans l’aventure. Car à l’instar des portages / remaster des deux autres Final Fantasy de la Playstation, FFVIII embarque des options venant augmenter le confort de jeu telles que la suppression des combats aléatoires, l’augmentation de la vitesse de jeu ou même la possibilité de bidouiller officiellement, tel un Action Replay embarqué, les statistiques des personnages. Pour être sincère, je suis sans doute trop puriste des FF pour trouver ces options intéressantes, et dommage qu’il n’existe pas d’option « confort » permettant de nier le bourrinage de touche pour booster l’efficacité des invocations – je suis sûr que vous vous souvenez d’à quel point c’était laborieux à chaque combat de boss et surtout pas très excitant. La bande originale du jeu nous est quant à elle livrée telle quelle, et bien que ce n’est pas un mal en soi vu la qualité du travail de Nobuo Uematsu, il aurait été sympathique de pouvoir bénéficier de versions réorchestrées pour accorder encore plus d’ampleur aux compositions du maître.

Note

17/20

Comme à chaque test de portage rehaussé de Square Enix, il est plutôt difficile de tomber d'accord sur une note sans avoir l'impression de décauser le jeu d'origine. Final Fantasy VIII était un grand jeu qui a juste souffert du manque de comparaison avec le reste de la série pour le public européen, sa plus grande tare étant d'être passé après un Final Fantasy VII qui aura marqué les esprits. Ce remaster, bien que très propre, manque de finition sur quelques petits détails et s'encombre d'options superflues. Il incarne malgré tout la meilleure occasion de (re)découvrir ce monument injustement raillé qu'est Final Fantasy VIII, et c'est un inconditionnel de FFVII qui vous le dit !

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