Dishonored 2 – Ne tirez pas sur le « testeur »

Dishonored 2 – Ne tirez pas sur le « testeur »

Au lendemain de la sortie du très attendu Dishonored 2, Press-Start prépare encore sa critique. En attendant, nous vous proposons un regard professionnel sur un aspect fondamental de sa production : le « test ».

Soyez indulgent avec les testeurs de jeux vidéo ! Voilà en résumé le message que vous adresse Donat Bihr, game designer et testeur professionnel. D’Ubisoft Annecy à Arkane Lyon, Donat Bihr a exercé son métier de testeur notamment sur les séries Assassin’s Creed et Dishonored. Depuis plus d’un an, il ausculte toutes les failles de Dishonored 2 et vous en parle pendant deux heures dans la vidéo ci-dessous tournée au PointCulture de Bruxelles.

Dishonored titre

S’il appelle à la mansuétude envers sa profession, c’est qu’il connaît bien tous les aspects de la production d’un jeu vidéo, et d’un triple A en particulier. Il serait en effet trop facile de rejeter sur le testeur tous les maux d’un jeu, qui résultent parfois des impératifs commerciaux. Les enjeux financiers, indissociables de la création dans cette industrie, dictent souvent la marche à suivre. Jusqu’à imposer la sortie d’un titre mal fini – comme Assassin’s Creed Unity, sur lequel Donat Bihr a travaillé, ou plus récemment Mafia 3 auquel il adresse quelques piques confraternelles.

Après avoir présenté le schéma classique de la production d’un jeu (à gros budget), l’invité de PointCulture décrit les différents métiers actifs dans le jeu vidéo, toujours plus spécialisés à cause de la complexité des développements. Il entre ensuite dans le vif du sujet en explorant la question des bugs, classés en plusieurs catégories. Entre le bug inacceptable – par exemple celui qui provoque le plantage du jeu – et le bug cosmétique plus anodin, il existe aussi une classe de bug moins connue.

Un studio peut ainsi délibérément choisir de ne pas « fixer » (réparer) un bug. Pourquoi ? D’abord parce qu’il ne gêne pas l’expérience globale. Ensuite, parce que sa réparation nécessiterait des efforts disproportionnés par rapport à sa gravité. Enfin, parce qu’il autorise certains joueurs à explorer le jeu différemment. C’est le cas notamment des « speedrunners », qui cherchent les moyens de « casser » le jeu afin d’accélérer leur progression. Les studios sont donc taquins mais aussi lucides, car ils savent qu’un jeu comme Dishonored, par exemple, présentera toujours des failles. Le premier Dishonored, avec ses nombreuses possibilités, donne lieu à un gameplay « émergent », dont raffolent les speedrunners. Bonne nouvelle, Dishonored 2 recèle aussi des ingrédients alimentant cette variété inattendue !

Alors que le testeur était autrefois relégué dans une petite pièce à la cave, il fait désormais partie du studio et multiplie les interactions avec les autres métiers. Du moins dans un studio comme Arkane, qui encourage les échanges entre tous ses collaborateurs. Voilà ce qui motive Donat Bihr dans son travail, une véritable source d’épanouissement personnel pour lui. En contrepartie, sa tâche n’est pas très lucrative, à l’image de l’industrie du jeu vidéo dans son ensemble. Mais pour ceux qui voudraient y mettre un pied, il conseille ce métier de testeur qui peut, aussi, constituer une carrière intéressante en soi à ses yeux.

Donat Bihr termine son intervention en abordant un sujet qui fâche : le patch « day one ». Et, sur ce point précis également, ses explications atteignent son objectif. Après deux heures d’une présentation agréable et instructive, on comprend mieux les difficultés du testeur et on saisit surtout la place délicate qu’il occupe dans la production d’un jeu vidéo. On vous laisse regarder cette vidéo passionnante et on vous encourage à venir en discuter avec nous sur le forum de Press-Start.

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