Retro VGS : une réponse coûteuse à de saines envies

Retro VGS : une réponse coûteuse à de saines envies

Mise à jour, temps de chargement et contenu téléchargeable. Trois notions à bannir du glossaire des jeux vidéo pour la Retro VGS. Présentation d’une machine en campagne de financement participatif.

Depuis la rédaction de cet article, la campagne de financement a été stoppée, faute de fonds suffisants. Plutôt que de jeter notre article à la poubelle, nous vous le proposons avec les réserves d’usage.

Retro VGS-cartridge comeback

La Retro VGS (pour « Video Game System ») se présente comme une console dans l’esprit retro. Pour répondre à cette définition, elle est alimentée par des jeux sur cartouches. De cette particularité découlent plusieurs caractéristiques : des jeux sur support physique uniquement, pas de connexion à internet, pas de possibilité de patch et aucun temps de chargement. Le modèle est clair : les consoles pré-CD et leur fonctionnement « on branche, on joue ».

L’intérieur de la Retro VGS fait aussi des clins d’œil appuyés aux consoles d’antan. De manière plutôt sophistiquée d’ailleurs, grâce à une puce de type « FPGA ». Il s’agit d’un circuit imprimé programmable qui peut être reconfiguré à la volée par la modification de ses connexions. Dans le cas présent, l’idée est de pouvoir transformer la Retro VGS en une console du passé (théoriquement, n’importe laquelle). Par cette mutation au niveau matériel, la Retro VGS sera ainsi capable d’agir comme une authentique Super Nintendo, par exemple, et de faire fonctionner les jeux correspondants sans les altérations provoquées par l’émulation logicielle. Il suffira que la cartouche de jeu contienne un code « transforme-toi en PC Engine » pour que la Retro VGS devienne une véritable console NEC et interprète le jeu de cette façon. On éteint et on rallume, cette fois avec une cartouche « transforme-toi en Master System », et voilà que la Retro VGS se mue en une 8 bits de Sega plus vraie que nature. La communication en amont évoquait déjà la possibilité de commercialiser des adaptateurs de cartouche pour utiliser vos vieux jeux Sega, Nintendo, Atari, etc.

La console que les homebrews attendent ?

La scène amateur adore regarder derrière elle. Le mook de retrogaming Pix’n Love nous le prouve à chaque numéro dans sa rubrique Retro News, qui présente les dernières sorties « homebrew » sur les consoles classiques. Ces projets se distribuent souvent sous une forme téléchargeable, à utiliser en émulation ou sur la machine originale au moyen d’une cartouche Everdrive, par exemple. Parfois, les productions les plus abouties ont même droit à une édition physique. Pour un tarif (plus ou moins) raisonnable, vous pouvez ainsi acquérir un jeu neuf sur NES. Mais quand la machine visée implique un coût de fabrication élevé, la facture explose. La Neo Geo reste ainsi la « console de riche » par excellence. Or, elle fascine encore les développeurs amateurs, notamment ceux du studio NG.Dev Team qui l’alimentent encore en jeux de très grande qualité pour qui sait se les payer. Kraut Buster, la dernière création de la NG.Dev Team, est vendue sur cartouche Neo Geo AES/MVS au prix de 400 euros ! Sur la Retro VGS, l’équipe est prête à diviser son prix quasiment par dix. Elle annonce ainsi son fantastique Gunlord (un superbe hommage à Turrican) à 60 dollars.

Certes, comme le relève à juste titre MO5, tous les jeux amateurs ne méritent pas une sortie physique. Mais pour qui s’intéresse à cette scène, la Retro VGS a de l’avenir. Et son avenir ne se situe pas uniquement dans les consoles du passé.

Retro VGS-Songbringer

La terre promise des indés ?

La tendance du « neoretro » ne vous a pas échappé. Et depuis le temps qu’elle existe, elle ne peut plus être considérée comme une mode. Hotline Miami, Shovel Knight et les autres ont prouvé que le marché existait et que les créations d’aujourd’hui étaient tout aussi bonnes que leurs aînées. C’est principalement sur cette vague indé que compte surfer la Retro VGS. En s’annonçant compatible avec le moteur Unity notamment, elle s’ouvre à la production indé pour le présent et le futur. Elle offre aux développeurs indé la possibilité de publier leurs créations sous une forme physique à partir d’une quantité produite infime (on parle d’un minimum de 50 exemplaires). Mais qui a envie de payer au moins 30 euros pour un titre distribué à moitié prix sur Steam ?

L’expérience d’IndieBox met de l’eau au moulin de la Retro VGS. IndieBox est une plateforme de distribution physique pour les meilleurs jeux indé. Dans le cadre d’un abonnement ou par un achat unique, le joueur peut y obtenir des versions « boîte » de certains titres renommés : Guacamelee, The Next Penelope, Apotheon, etc. Ces éditions de prestige contiennent généralement des goodies, un CD de la BO et une clé USB contenant le jeu ou un code de téléchargement. Une cartouche de jeu permettrait certainement d’aller jusqu’au bout du trip.

Les clients d’IndieBox constituent un premier public cible pour la Retro VGS ; des joueurs qui restent attachés à l’objet jeu vidéo. Parce qu’un tel objet permet la collection et parce qu’il vous décroche un sourire quand votre regard tombe sur lui dans votre étagère. La Retro VGS vise les collectionneurs déçus par l’industrie moderne du jeu vidéo et sa ruée vers la dématérialisation. Elle leur murmure des mots magiques à l’oreille : boîte, livret en couleur et cartouche « durable ».

Retro VGS-Shantae

La question de la préservation du patrimoine vidéoludique se pose souvent au passé : comment conserver des ancêtres tels que l’Odyssey de Magnavox ou les premiers Pong ? Cette question porte rarement sur l’avenir : qu’en sera-t-il des jeux d’aujourd’hui dans quinze, vingt ans ? Si Steam coupait le courant, que deviendraient nos centaines de jeux téléchargés ? La plateforme de Valve jouit d’une position monopolistique qui la rend éternelle à nos yeux. Comme chaque colosse aux pieds d’argile… Dans ces conditions incertaines, le droit de propriété se transforme en droit de location pendant le temps que les systèmes voudront bien nous accorder. En une période somme toute limitée, des titres ont ainsi déjà disparu des marchés virtuels Xbox et Playstation. Tout récemment encore, la version iOS de Bioshock a été enlevée des serveurs sans possibilité de (re)téléchargement ; tant pis pour les acheteurs qui l’avaient supprimée temporairement de leur tablette. De même, le recours aux serveurs pour appuyer la puissance des machines (comme pour le prochain Crackdown) paraîtra une moins bonne idée au moment de la fermeture inévitable de ces serveurs.

Cette « évolution » de la distribution, certains joueurs ne l’avalent pas. On les traite parfois de grincheux sur les forums, même si on sait déjà qu’ils riront bien quand ils riront les derniers. La Retro VGS leur tend les bras ! Avec ses cartouches résistantes, elle leur rend la pleine propriété de leur achat. Ainsi que la possibilité illimitée d’échanger leurs jeux, de les revendre ou de les prêter. Un retour à l’état naturel qui plaît à une certaine niche. Mais à quoi ressemble cette niche ?

Réactions

  • Cyborg Jeff le 14/10/2015

    Perso, je trouve le concept intéressant. Les RetroN étaient franchement moche et ce que j’en avais lu était dissuadant. Indépendemment de l’aspect utilisation d’anciens jeux, pouvoir disposer de versions physiques de titres à l’aspect oldschool me plairait fortement… Je suis tout à fait prêt à payer 20€ plutot que 10€ pour un titre à la Shovel Knight et Shantae si c’est pour avoir une version physique qui puissent vivre au dela du bon vouloir d’une société et son serveur.

    J’ai acheté bcp de titres indie sur le PStore de la PS3… Qu’arrivera-t-il quand Sony coupera les vivre à cette dernière, alors qu’il a déjà choisi de ne pas les rendre compatible si j’achetais une PS4… (Na, na et na je le redis, mon cher Sony, si tu y avais pensé cela ferait longtemps que j’aurais acheté une PS4… mais tu es trop occuper à ne ne chercher qu’à convaincre les amateurs de CallofDuty et les jeux en réseaux…)

    Clairement à l’heure actuelle je me sens en rupture totale face à la PS4 et la Xbox One, là où je me retrouverais dans une Retro VGS…

    Néanmoins, je pense que je ne mettrais pas plus de 150€ pour l’achat d’une telle machine.

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    • spacecowboy le 15/10/2015

      Le prix annoncé a freiné plus d’une personne intéressée a priori. Les initiateurs du projet essayeront probablement de baisser le prix pour relancer une campagne de financement participatif. Sans doute aussi en ayant un prototype fonctionnel cette fois.

      Pour ma part, c’est plutôt l’incertitude qui m’a retenu de soutenir financièrement le projet. Si je trouvais une Retro VGS en magasin à 300 euros, je l’achèterais tout de suite. Et je mettrais même 50 euros de plus pour une édition bleue « Sonic » 😉

      J’espère que le projet va se relancer convenablement. Le concept est trop beau pour ne pas être exploité. Et je sais déjà que si la console sort un jour, je vais probablement succomber à la tentation du full set contemporain. C’est comme un rêve de collectionneur… Toutes proportions gardées, si j’avais eu du fric au moment de la Neo Geo, j’aurais certainement fait des folies 🙂

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