Le système solaire de Sega

Le système solaire de Sega

Si vous fréquentez les forums dédiés au retrogaming, vous savez que les échecs de Sega alimentent d’interminables discussions où la mauvaise foi côtoie les analyses pointues. Cette constellation de prétendues maladresses, l’auteur Aurélien Thévenot la met en orbite dans le système solaire de Sega.

« Vers la Saturn et au-delà », tel est le sous-titre de l’ouvrage paru chez Third Éditions. La Saturn, la seule console de Sega qui porte explicitement un nom de planète, est la star de ce livre de plus de deux cents pages. Mais autour d’elle, d’autres machines et projets avortés de Sega y prennent le nom des planètes de notre système solaire. Comme une invitation au voyage spatial dans la galaxie Sega.

Il suffit de lire la liste de sources en fin d’ouvrage pour s’en rendre compte : « Le système solaire de Sega » est le fruit d’un énorme travail de recherche. En se basant sur des communiqués officiels, des confidences d’acteurs de l’époque, des scoops journalistiques ou encore des révélations tardives, l’auteur retrace une histoire du Sega constructeur comprise entre la Mega Drive et la Dreamcast. Entre le plus grand succès occidental de la marque et son chant du cygne, Sega a vécu des événements passionnants à lire. Et même aux connaisseurs, l’auteur en apprendra de belles !

Les années nonante dans le jeu vidéo dégagent une folie qu’on ne retrouvera plus par la suite. Ça tombe bien pour l’auteur, qui s’amuse à raconter les frasques et les coups bas de cette période. Quel délice en particulier de se souvenir des publicités à la télévision ou dans les magazines ; il faut dire que Sega n’était pas le dernier à se moquer de ses adversaires. Nintendo et puis Sony lui rendirent d’ailleurs la monnaie de sa pièce, Sega l’avait bien mérité. Tout ça pour dire que le livre de Third Éditions vous fera souvent sourire, sous ses dehors sérieux. D’une manière générale aussi, les chapitres se dévorent avec gourmandise sans aucune lassitude.

Une chaîne Youtube reprend une partie des publicités citées dans le livre.

Mais quelle est donc finalement cette histoire de système solaire ? En réalité, Aurélien Thévenot accumule les preuves et les indices, puis fait ses propres déductions pour placer les projets de Sega autour de notre Soleil. Il explique même sa méthode dans une dernière partie pleine de remises en question et de mystères encore inexpliqués. Mais pour en arriver là, il va d’abord détailler chaque planète, chapitre par chapitre. Outre la Saturn évidemment, vous connaissez peut-être le projet Neptune, mais vous ignorez sans doute ce que cachent nos voisines Vénus, Pluton ou Mercure.

Chaque chapitre commence en décrivant la genèse du projet concerné. On assiste ainsi aux débats internes, dont les plus fameux naissent des tensions entre les deux entités « Sega of Japan » et « Sega of America ». Forte de son succès sur son sol avec la Mega Drive, la branche américaine aurait mérité d’avoir plus son mot à dire sur le futur de la marque. Et qui sait ce qu’aurait donné le projet de rapprochement entre Sony et Sega pour une machine 32 bits ? Sega of Japan a mis fin à ces pourparlers, comme l’avait fait Nintendo auparavant, et on connaît la suite avec le phénomène Playstation. Cette période charnière pour le marché des consoles, déjà décrite dans l’ouvrage « Console Wars », est tout aussi captivante dans ce nouveau livre.

Ensuite, l’auteur retrace la vie de chaque projet (pour autant qu’il ait jamais existé) et décrit en détail les différentes stratégies utilisées pour susciter ou réveiller l’intérêt des joueurs. Baisses de prix, nouveaux packs et sorties de jeux phares n’auront plus de secrets pour vous. À plusieurs occasions, les chapitres font aussi le point sur la concurrence en évoquant les chiffres de vente des uns et des autres, qui furent tellement décisifs pour les repositionnements des systèmes Sega en cours de route.

Enfin, l’envie de réhabiliter ces projets plus ou moins boiteux est, comme dirait l’autre, plus forte que toi. L’auteur prend ainsi un plaisir manifeste à nous dévoiler ses coups de cœur sur les systèmes commercialisés. En effet, malgré le succès relatif de certaines machines, tout n’est pas à jeter dans leur ludothèque. En particulier pour la Saturn, la lecture des conseils de jeux vous incitera forcément à revoir votre jugement sur cette console encore mal perçue aujourd’hui. Pour la 32 bits de Sega, Aurélien Thévenot prend son temps pour bien démontrer le potentiel de la bête, malgré sa conception délicate à maîtriser pour les développeurs. On ne lui donnera pas tort, si la Playstation a foudroyé la Saturn en Occident, cela n’a plus de sens de les opposer aujourd’hui. Alors profitez-en et redécouvrez les merveilles publiées sur l’avant-dernière console du constructeur.

Aurélien Thévenot a noirci deux centaines de pages, sans images, pour évoquer ce que l’on présente parfois comme les vilains petits canards de Sega. La Game Gear et la Nomad bouffeuses de piles, le Mega CD rongé par le FMV, le 32X synonyme d’add-on inutile et la Saturn centrée sur la 2D… Il est tellement réducteur de résumer ainsi ces machines et « Le système solaire de Sega » nous éclaire encore un peu plus sur la raison d’être de ces projets. Quant à la Saturn, elle a une place importante dans le cœur de l’auteur, qui revient longuement sur toutes ses facettes.

On vous conseille vivement ce nouvel ouvrage de Third Éditions, que vous soyez un fan inconditionnel de Sega ou que vous cherchiez des munitions pour continuer à dézinguer la marque sur les forums et réseaux sociaux.

« Le système solaire de Sega. Vers la Saturn et au-delà » est disponible, entre autres, sur le site de Third Éditions au prix de 24,90 euros.

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