Etrian Mystery Dungeon : le cross-over punitif.

Etrian Mystery Dungeon : le cross-over punitif.

La série Etrian Odyssey est reconnue par les fans de J-RPG comme une des plus difficiles de ces dix dernières années. Entre les plans des donjons à dessiner soi-même, des ennemis retors qui ne vous pardonnent quasiment aucune erreur de stratégie, une histoire très longue parsemée d’embûches, peu de joueurs sont parvenus à la fin de chaque épisode. Autre saga à s’être fait un nom jusqu’en Occident, Dungeon Mystery se base essentiellement, pour ne pas dire exclusivement sur l’exploration répétée de donjons générés aléatoirement pour y récupérer des objets, de l’équipement ou des trésors et progresser vers des niveaux de plus en plus difficiles. La rencontre de ces deux univers s’annonçait comme un véritable challenge pour les vidéo-rôlistes et ils ne seront pas déçus de ce côté-là…

Un scénario prétexte

Etrian Mystery Dungeon - Kasumi

Kasumi, la gérante de l’hôtel, vous offrira régulièrement des cadeaux pour vous aider.

Vous débutez dans la peau d’un explorateur fraîchement arrivé à Arslaga, la ville de départ de toutes les expéditions vers l’arbre-monde Yggdrasil et les régions environnantes. Ce hub central comporte différents bâtiments où vous serez amenés à vous rendre très régulièrement : l’hôtel pour vous y reposer, stocker du matériel ou de l’argent et sauvegarder, le restaurant pour y recevoir des quêtes annexes et déguster des repas aux effets bénéfiques, le marchand, la propriété du chef du village qui vous donne les quêtes principales, le laboratoire, le port et le bureau de la guilde des explorateurs.

Les deux, trois premières heures de jeu sont très dirigistes et sont là pour vous faire découvrir ces différents lieux un par un. Tout d’abord, vous devrez créer votre groupe d’explorateurs en sélectionnant jusqu’à dix personnages parmi les classes proposées. Seuls quatre sont jouables en même temps, les autres restant au siège de la guilde pour s’entraîner et quand même augmenter un peu en expérience. Plutôt une bonne idée qui évite au joueur de devoir se taper quarante fois un même donjon avec différentes combinaisons de persos pour les faire tous progresser.

Etrian Mystery Dungeon - Magan

Magan fait office de « chef du village » et vous assignera vos missions principales.

À partir du moment où vous recevez votre deuxième mission principale de la part de Magan, le « maire » de la ville, vous devenez plus autonomes dans vos mouvements et vos choix de destination. Libre à vous alors de n’exécuter que les contrats de la trame principale ou de faire toutes les quêtes annexes proposées par le jeu tout en farmant les donjons déjà explorés, le level-design de ceux-ci changeant à chaque visite de façon aléatoire. Là où je trouve que c’est un poil abusé, c’est quand un étage change complètement entre deux passages par un étage adjacent, faisant perdre tout repère au joueur. Si vous devez vite courir vers les escaliers d’entrée pour sauver votre équipement et qu’au lieu d’être à deux salles ils se trouvent à l’autre bout de la map, c’est rageant.

Punitions en série

Malheureusement, je ne pense pas que vous atteindrez la fin du jeu en voulant tracer jusqu’à l’atteindre… Les premiers mobs rencontrés ne posent aucun problème mais très vite, vous vous retrouverez face à des créatures supérieures en nombre et en force qui pourraient décimer votre équipe en quelques tours. La mort n’est pas permanente mais tout de même particulièrement punitive car vous perdrez tous les items et l’argent en votre possession ainsi qu’une pièce d’équipement aléatoire de chacun des personnages. Quand on vient de dépenser toutes ses économies durement gagnées dans l’achat de la meilleure épée disponible et que, « comme par hasard », c’est cela qui est perdu en mourant, il y a de quoi rager…

Etrian Mystery Dungeon - boss

Ce boss n’est vraiment pas très commode… Vraiment pas…

Heureusement, le jeu laisse la possibilité de quitter un donjon à tout moment, soit en retournant sur vos pas jusqu’à l’entrée du premier palier, soit en utilisant un fil d’Ariane pour vous téléporter directement dehors, à l’exception des combats contre les boss qui ne peuvent se solder que par la victoire ou la mort. Ainsi, tant qu’il vous reste un héros en vie, vous conservez tous vos acquis et tous vos persos récupèrent l’entièreté de leurs points de vie, de faim et de technique, sur lesquels je reviendrai un peu plus tard.

Néanmoins, réfléchissez bien à une stratégie avant d’aborder un donjon et même avant de vous en prendre à un monstre, les mauvaises surprises étant récurrentes dans ce jeu. Il n’est pas rare de croiser une créature spéciale qui vous arrache 40 de vos 70 points de vie d’un coup quand vous ne lui en infligez que 15 en retour… Oui, on sent ses mains se crisper sur la console dans pareille situation… De mon point de vue, ça déséquilibre le jeu en défaveur du joueur et le force à quitter un donjon en urgence pour soigner ses personnages, renforcer son équipement et recommencer ensuite le niveau depuis le début. De fait, l’exploration multiple devient forcée plutôt que d’être un choix volontaire de farming venant du joueur.

De plus, le soft ne propose qu’un seul emplacement de sauvegarde et ne permet pas de désactiver l’auto-save, qui se déclenche à chaque entrée ou sortie de donjon, que cette dernière soit voulue ou due à la mort de vos personnages… Moi qui ai l’habitude de profiter de TOUS les slots disponibles dans les RPG pour effectuer des sauvegardes fréquentes (plus de 300 saves avant de terminer Resonance Of Fate par exemple) et pouvoir revenir en arrière si j’ai fait l’imbécile, ça me gave rapidement de ne pas être libre de tester différentes approches et combinaisons de personnages pour trouver sans péril la meilleure façon de venir à bout d’un niveau. Une erreur = sanction ; un risque mal calculé = punition. Pas trop ma tasse de thé, j’ai failli lâcher le jeu après deux heures tellement j’étais dégoûté…

Un gameplay aux multiples facettes

Etrian Mystery Dungeon - équipe

Pendant les phases d’exploration, vos alliés suivent le personnage leader.

Comme déjà dit, vous dirigez une équipe de quatre explorateurs sélectionnés parmi dix classes de personnages disponibles. Parmi eux, vous désignez un leader que vous dirigerez directement en parcourant les donjons, les autres se contentant de vous suivre et de répondre aux attaques ennemies. Chaque personnage dispose de trois jauges : la vie, la technique utilisée pour les attaques magiques et spéciales, et la faim, qui représente en quelque sorte la fatigue du leader pendant qu’il dirige son équipe. Marcher fait remonter la vie à chaque pas tandis que la jauge de faim diminue au même rythme. Vous pouvez acheter ou trouver des objets pour nourrir le leader ou en changer rapidement via le menu pour prendre le contrôle d’un autre héros à la jauge de faim encore pleine. Pendant les combats contre les boss, vous dirigez tous les membres de votre équipe à tour de rôle.

Comme dans la plupart des RPG, vous emmagasinez de l’expérience en tuant des monstres et en accomplissant les missions que l’on vous propose. À chaque montée de niveau, vous gagnez un point de compétence à attribuer à une technique active (double frappe, boule de feu, coup surpuissant, …) ou passive (augmentation de la défense ou des points de vie, recherche, minage, …). Penser à l’équilibre de l’équipe est primordial car si avoir trois tanks garantit une plus longue espérance de vie théorique, n’avoir aucune attaque spéciale ou aucune compétence en minage, minéralogie ou herboristerie pour récolter des objets de plus grande valeur dans les donjons vous fera perdre beaucoup de temps à faire, refaire et rerefaire les mêmes niveaux pour abattre le boss ou trouver LE truc demandé pour accomplir une quête annexe.

Des objectifs annexes qui deviennent obligatoires

Une autre constante dans les RPG japonais contemporains est la profusion de « quêtes » annexes qui se prolongent durant toute l’aventure : élevage de « compagnons », amélioration d’une « base » et/ou de ses équipements, évolution des relations entre protagonistes, … On est loin des jeux de rôle classiques qui vous demandaient seulement d’aller buter le dragon pour sauver la princesse en secourant quelques âmes égarées au passage. Cela donne généralement un peu de variété dans une aventure généralement linéaire.

Etrian Mystery Dungeon - chef guilde

Le chef de la Guilde des Explorateurs a l’air sévère mais il vous apporte de nombreux bons conseils.

Tant que ces quêtes restent annexes et offrent des récompenses facultatives, laissant le joueur seul juge pour décider de les faire ou non, ça passe. Hélas, dans de plus en plus de titres, ces objectifs annexes deviennent quasiment obligatoires tant il est difficile, voire impossible, de progresser sans en accomplir une grande partie et récolter les bonus qu’ils offrent. Etrian Dungeon Mystery ne fait pas exception et vous serez régulièrement amenés à farmer un donjon à plusieurs reprises pour récolter des objets précis droppés aléatoirement ou ramasser assez d’argent pour développer un bâtiment d’Arslaga. Certains peuvent y trouver leur compte mais je n’aime pas cette manière de prolonger artificiellement la durée de vie par des tâches répétitives sans grand intérêt dans le scénario. C’est une des raisons qui font que je ne me lance plus que rarement dans un RPG japonais actuel, j’aime pouvoir décider des quêtes annexes que j’ai envie de faire et de quand j’ai envie de les faire sans me sentir forcé par une trame principale trop ardue.

Graphiquement réussi

La réalisation technique est impeccable, une très bonne habitude des jeux développés par Atlus, que ce soit sur consoles de salon ou sur portables. Les environnements sont colorés et chaque donjon dispose d’un petit cachet particulier pour le distinguer des autres. Les décors sont détaillés mais pas trop, histoire de ne pas distraire le regard pendant les phases d’exploration. Les conversations avec les PNJ donnent lieu à des petites saynètes en images fixes. Les textes sont uniquement en anglais et demandent un minimum de compréhension de la langue de Shakespeare pour savoir quoi faire dans certaines quêtes annexes.

L’interface de jeu et les menus sont clairs et rapidement compréhensibles. L’attribution de raccourcis simplifie encore la navigation, vous évitant ainsi de rester à vous demander « Mais où dois-je aller pour trouver cela ? ». Et vu le nombre de choses à faire et à retenir, c’est appréciable de ne pas devoir perdre trop de temps à chercher dans les menus.

Note

13/20

Etrian Mystery Dungeon n’est certainement pas un mauvais soft mais je n’ai pas du tout accroché à son système de jeu hybride qui regroupe tout ce que je n’aime pas dans les J-RPG modernes et les « dungeon explorers », malgré la présence de quelques bonnes idées plus ou moins bien exploitées. Un titre à réserver à un public averti et qui a suffisamment de temps à lui consacrer et de patience pour en découvrir tous les tenants et aboutissants. Et avec les années qui passent, je n’ai plus ni l’un ni l’autre malheureusement…

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