La Zone du Dehors (Alain Damasio)

La Zone du Dehors (Alain Damasio)

Cher lecteur intelligent et cultivé, vous et moi sommes à l’aube d’une nouvelle chronique. Je le disais encore à mon voisin Roger : sur Press-Start, il manque une section pour causer bouquin. Parce qu’entre deux dérouillages de monstres, il est bon parfois de faire marcher les quelques neurones et cellules qui ne sont pas reliés au farming et aux muscles de votre poignet.

Désormais, je vous présenterai à intervalles relativement irréguliers (ben oui, faut pas déconner non plus) livres et bande-dessinées à la qualité irréprochable. Ou pas.

La Zone du Dehors (Alain Damasio)

En 2084, les citoyens de Cerclon, une société basée sur un satellite de Saturne, mènent leur petite vie tranquille. Leur monde est dirigé par un gouvernement régissant leur ascension sociale, disposant d’une sécurité sans faille et encourageant la consommation à son maximum.

Cependant, il y a une certaine branche d’habitants qui n’accepte pas le fonctionnement de ce monde, scandalisés par la passivité de leurs concitoyens et la propagande fédérale. Ils sont les seuls à pénétrer, parfois, dans la Zone du Dehors, partie totalement inhabitée du satellite. Ces gens, ce sont la Volte, menée par Captp et ses compagnons. Ensemble, ils feront la Volution. En perdant beaucoup et en gagnant tout.

Changer leur monde, en créer un nouveau, voilà leurs ambitions.

N’ayant jamais lu un livre de Damasio auparavant, je n’avais aucune attente et peu d’aprioris, à peine savais-je qu’il écrivait majoritairement de la science-fiction.

Et pourtant, quelle claque ! Entre la description de cette société implacable dont les rouages paraissent inoxydables et la ferveur de la Volte, il y a une réflexion immense qui s’en dégage, notamment à propos de la société de contrôle, faisant débat actuellement, mais aussi sur le principe tout bête du « quel combat vaut la peine d’être mené ? » et les sacrifices allant de pair avec celui-ci. N’oublions pas le fond de transhumanisme, concept prôné de nos jours par Google, pour ne citer qu’eux.

On se retrouve donc face à ce système du Clastre, départageant tous les deux ans les citoyens selon leurs actions, leur efficacité au travail, etc. Il est intéressant de noter que les habitants s’évaluent les uns les autres et se surveillent donc mutuellement. De ce bulletin résulte un changement dans votre dénomination. En effet, chacun a un certain nombre de lettres composant son prénom, de cinq à une seule et unique consonne ou voyelle, et ledit nom change donc tous les deux ans. Bien sûr, plus vous êtes proche du début de l’alphabet, plus vous êtes important, aussi le président de ce joli monde n’est autre que A.

Par ailleurs, La Zone du Dehors bénéficie d’une narration hors normes et superbement ficelée. Ainsi, l’histoire et ses situations ne nous sont pas contées par une, mais bien par sept personnes. Les cinq leaders de la Volte, Bdcht « Boule de Chat », la compagne de Captp, et le président A. Chaque changement de narrateur est marqué par un signe de ponctuation « > » mais aucune information directe sur notre guide n’est donnée. Le lecteur pourra cependant facilement se rendre compte de son identité grâce au vocabulaire employé et aux allusions à son passé. Je ne vous cache pas que j’ai été un peu perturbé par ce principe en cours de lecture, mais c’est une excellente surprise et une astuce judicieusement utilisée !

Dois-je le lire ?

Je ne vais pas vous mentir, l’œuvre de Damasio a aussi ses quelques moments creux et plus fatigants, mais l’ensemble est d’une telle justesse et d’une telle puissance qu’il serait bête de passer à côté. Entre sa critique violente mais pleine de vérité (et d’anticipation, l’auteur a tout de même sorti le bazar en 1999), la pression exercée par chaque situation et ses scènes d’action magnifiquement décrites, La Zone du Dehors est un must-read, ni plus ni moins, que vous soyez amateur de science-fiction ou non.

Néanmoins, il me semble utile de préciser que le vocabulaire est plutôt développé et pas forcément facile à appréhender par le lecteur moyen. À vos dictionnaires, donc 🙂

Réactions

  • Ender le 18/06/2014

    Tu auras au moins convaincu une personne de le lire…
    Pour ma part je te propose de lire « La horde du contrevent » du même auteur qui est un livre magnifique.

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    • Dottmungeer le 18/06/2014

      Déjà lu, j’en ferai sans doute même un article 🙂 Vraiment très bon. J’ai préféré la Zone du Dehors tout de même, mais je lirai bientôt « Aucun souvenir assez solide » qui a l’air très bon aussi 🙂
      Merci pour le commentaire en tous cas ! 😉

      Répondre

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